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Déjà pourfendeur du projet de Constitution européenne
rejeté par les français en 2005, l'économiste et professeur d'informatique
Etienne Chouard dénonce violemment le nouveau traité de Lisbonne. Une copie
conforme du texte précédent, estime-t-il.
François VIGNAL
LIBERATION.FR : lundi 22 octobre 2007
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Etienne Chouard s'était fait connaître en 2005 grâce à son site internet
qui décortiquait et dénonçait la Constitution européenne. Il revient
aujourd’hui à la charge contre le nouveau traité européen de Lisbonne. Pour ce
professeur d’économie, de droit et d’informatique d’un lycée du sud de la
France, il s’agit sur le fond de la même Constitution, pourtant rejetée par
les Français et les Hollandais. Et appelle à la combattre. Entretien.
Le nouveau traité européen a été adopté vendredi à
Lisbonne. Ce texte ressemble-t-il à la Constitution rejetée en 2005 ?
Ce n’est pas une version édulcorée, c’est la même version et je la combats
violemment. On a retiré trois détails sans importance : le drapeau, l’hymne,
la référence à la monnaie, le mot Constitution, comme si le fait de retirer
l’étiquette retirait le danger. Et puis on nous impose par voie parlementaire
ce qu’on vient de refuser par référendum. Pour moi, c’est un viol, un
viol politique, c’est une cause de guerre civile. Et les journalistes qui
défendent cela sont subordonnés. Ils ne font pas leur boulot de journaliste.
Pour vous, un nouveau référendum est un minimum ?
Oui, ça me paraît évident, pour cinq raisons. Parce que sur le fond, tout ce
qui est dangereux est là : la confusion des pouvoirs dans les mains de
l’exécutif, avec les «procédures législatives spéciales» ou les «actes non
législatifs». Le Parlement ne les contrôle pas et ce sont des normes
obligatoires qui s’appliquent à tout le monde. C’est incroyable. Et cela peut
concerner la concurrence, le marché intérieur, la circulation de capitaux, des
choses très importantes, qui sont hors contrôle !
Deuxième point : la dépendance des juges européens vis-à-vis de l’exécutif
pour leur carrière. Ils sont nommés pour six ans par les gouvernements, et
renouvelables. Dans les démocraties, ça ne se fait pas comme ça. L’indépendance
des magistrats est l’un des fondements de la démocratie.
Troisièmement : l’article 104 de Maastricht, c’est-à-dire l’interdiction pour
les Etats de créer la monnaie. On est fou d’accepter ça. Les Etats l’ont
accepté à Maastricht, c’est toujours là aujourd’hui. Maintenant, ils doivent
s’endetter quand ils ont besoin d’argent et payer un intérêt aux banques. Mais
on est fou ! C’est contraire à l’intérêt général. La souveraineté politique
dépend de la souveraineté monétaire. Si vous l’abandonnée, vous avez tout
perdu.
Autre point : la révision de la Constitution. Elle se fait sans les peuples.
Et enfin, dans cette Constitution, aucun organe n’est responsable de ses
actes. A part la motion de censure, qui est théorique, parce qu’à la majorité
des 2/3, il n’y a pas de mécanisme de responsabilité. Le Conseil des
ministres, le Conseil européen, le Parlement ne peuvent être renversés ou
dissous par personne. La Banque centrale n’a de compte à rendre à personne.
Mais qui est responsable de ses actes là-dedans ?
L’article sur la concurrence libre et non-faussée ne figure plus dans
le traité. Mais dans les annexes sur les dispositions pour le marché
intérieur, il est toujours dit que la concurrence doit être non-faussée.
Pensez-vous que les gouvernements veulent contourner les «non» français et
hollandais ?
Ils ne les contournent pas, ils les violent. Ils ont retiré le mot
Constitution et la partie III. Mais en réalité, elle est encore en œuvre.
C’est le royaume de l’hypocrisie. C’est de la violence.
Pensez-vous que la chancelière allemande Angela Merckel a pris
l’ascendant sur Nicolas Sarkozy ?
Non, pour moi, ils sont en collusion parfaite. Ils ont convenu du jeu que
Sarkozy allait jouer. Il a dit du mal d’eux, mais il sait très bien qu’il ne
peut rien faire. Il n’a qu’une envie, c’est de passer son traité en force,
comme les autres dirigeants européens.
La contestation peut-elle monter, notamment par Internet, comme en
2005 ?
Ça dépend des journalistes. En 2005, il a pu y avoir une contestation car il y
avait une perspective, un référendum. Mais si les gens qui vous gouvernent ont
décidé de vous violer, c’est-à-dire de ne plus vous demander votre avis, de
remettre le bâillon à la victime, eh bien elle ne peut plus crier. On ne nous
demande plus notre avis, là. Pourquoi les gens se mobiliseraient dans ce cas ?
Les visites sur mon site n’ont pas augmenté pour le moment. Mais je compte sur
les journalistes pour être les sentinelles du peuple et l’alerter.
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