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La galère de Nicolas Hulot (d'après Molière)

Un pastiche de la scène de la galère à propos de la démission de Nicolas Hulot

J’ai conservé les noms des personnages de théâtre et l’essentiel du dialogue : je n’ai procédé que par légères retouches

Géronte, père de Hulot, écologiste

Scapin, valet de Nicolas Hulot

 

***

GÉRONTE, SCAPIN.

SCAPIN, feignant de ne pas voir Géronte : Ô Ciel ! Ô disgrâce (1) imprévue ! Ô misérable père ! Pauvre Géronte, que feras-tu ?

GÉRONTE, à part : Que dit-il là de moi, avec ce visage affligé (2)?

SCAPIN, même jeu : N'y a-t-il personne qui puisse me dire où est le seigneur GÉRONTE?

GÉRONTE : Qu'y a-t-il, Scapin ?

SCAPIN, courant sur le théâtre, sans vouloir entendre ni voir GÉRONTE : Où pourrai-je le rencontrer, pour lui dire cette infortune ?

GÉRONTE, courant après Scapin : Qu'est-ce que c'est donc?

SCAPIN, même jeu : En vain je cours de tous côtés pour le pouvoir trouver.

GÉRONTE : Me voici.

SCAPIN, même jeu : Il faut qu'il soit caché en quelque endroit qu'on ne puisse point deviner.

GÉRONTE, arrêtant Scapin : Holà ! es-tu aveugle, que tu ne me vois pas ?

SCAPIN : Ah! Monsieur, il n'y a pas moyen de vous rencontrer.

GÉRONTE : Il y a une heure que je suis devant toi. Qu'est-ce que c'est donc qu'il y a ?

SCAPIN : Monsieur.

GÉRONTE: Quoi ?

SCAPIN : Monsieur, votre fils...

GÉRONTE : Hé bien! mon fils.

SCAPIN : Est tombé dans une disgrâce la plus étrange du monde.

GÉRONTE : Et quelle ?

SCAPIN : Je l'ai trouvé tantôt tout triste, de je ne sais quoi qu’on a fait, des soucis pour l’environnement je pense ; et, cherchant à divertir cette tristesse, nous nous sommes allés promener sur les Champs Elysées. Là, entre autres plusieurs choses, nous avons arrêté nos yeux sur Palais de l’Elysée. Un jeune Président de bonne mine nous a invités d'y entrer, et nous a présenté la main. Nous y avons passé ; il nous a fait mille civilités , nous a donné la collation , où nous avons mangé des fruits les plus excellents qui se puissent voir, et bu du vin que nous avons trouvé le meilleur du monde.

GÉRONTE: Qu'y a-t-il de si affligeant en tout cela ?

SCAPIN : Attendez, Monsieur, nous y voici. Pendant que nous mangions, il a réuni ses ministres, fit asseoir votre fils à cette table, et, une fois votre fils installé, il m'a fait mettre dans un taxi, et m'envoie vous dire que si vous ne lui envoyez par moi tout à l'heure une procuration à son nom sur la signature de votre fils, il embarque votre fils dans un safari au Congo.

CLAUDE VILLERS : Comment, diantre ! Ma signature ?

SCAPIN : Oui, Monsieur ; et de plus, il ne m'a donné pour cela que deux heures.

CLAUDE VILLERS : Ah le pendard de Président, m'assassiner de la façon !

SCAPIN : C'est à vous, Monsieur, d'aviser promptement aux moyens de sauver d'un safari en Afrique un fils que vous aimez avec tant de tendresse.

CLAUDE VILLERS : Que diable allait-il faire dans cette galère ?

SCAPIN : Il ne songeait pas à ce qui est arrivé.

GÉRONTE : Va-t'en, Scapin, va-t'en vite dire à ce Président que je vais envoyer la justice après lui.

SCAPIN : La justice pour un Président ! C’est impossible tant qu’il est en responsabilité ! Vous moquez-vous des gens ?

GÉRONTE : Que diable allait-il faire dans cette galère ?

SCAPIN : Une méchante destinée conduit quelquefois les personnes.

GÉRONTE : Il faut, Scapin, il faut que tu fasses ici l'action d'un serviteur fidèle.

SCAPIN : Quoi, Monsieur ?

GÉRONTE : Que tu ailles dire à ce Président qu'il me renvoie mon fils, et que tu te mettes à sa place jusqu'à ce que j'aie décidé de ce qu'il demande.

SCAPIN : Eh ! Monsieur, songez-vous à ce que vous dites ? et vous figurez-vous que ce Président ait si peu de sens, que d'aller recevoir un misérable comme moi à la place de votre fils, cette éminente tête de proue de l’écologie active ?

GÉRONTE : Que diable allait-il faire dans cette galère ?

SCAPIN : Il ne devinait pas ce malheur. Songez, Monsieur, qu'il ne m'a donné que deux heures.

GÉRONTE : Tu dis qu'il demande...

SCAPIN : Votre signature.....

GÉRONTE : Ma signature, et pourquoi ? N'a-t-il point de conscience ?

SCAPIN : Vraiment oui, de la conscience à un Président. La raison d’Etat y sursoit : il a besoin de la signature de votre fils pour avaliser un programme anti-écologique...

GÉRONTE : Mais pourquoi la mienne ?

SCAPIN : Votre autorité reconnue, le nom commun que vous portez, les convictions semblables que vous défendez, vous et votre fils ….

GÉRONTE : Croit-il, le traître, que notre nom, nos convictions ?

SCAPIN : Ce sont des gens de l’ENA, ils n'entendent point de raison.

GÉRONTE : Mais que diable allait-il faire dans cette galère ?

SCAPIN : Il est vrai. Mais quoi ? on ne prévoyait pas les choses. De grâce, Monsieur, dépêchez.

GÉRONTE : Tiens, voilà la clef de mon armoire.

SCAPIN : Bon.

GÉRONTE : Tu l'ouvriras.

SCAPIN : Fort bien.

GÉRONTE : Tu trouveras une grosse clef du côté gauche, qui est celle de mon grenier.

SCAPIN : Oui.

GÉRONTE : Tu iras prendre toutes les Programmes politiques qui sont dans cette grande manne, et tu les livreras aux Partis du Centre pour qu’ils aillent en délégation les échanger contre mon fils.

SCAPIN, en lui rendant la clef : Eh ! Monsieur, rêvez-vous ? Je n'aurais pas même le parti radical valoisien de tout ce que vous dites ; et de plus, vous savez que ces gens-là sont difficiles à décider et le peu de temps qu'on m'a donné.

GÉRONTE : Mais que diable allait-il faire à cette galère ?

SCAPIN : Oh ! que de paroles perdues ! Laissez là cette galère, et songez que le temps presse, et que vous courez risque de perdre votre fils. Hélas ! mon pauvre maître, peut-être que je ne te verrai de ma vie, et qu'à l'heure que je parle, on te fait signer la prolongation des glyphosphates pour 10 ans. Mais le Ciel me sera témoin que j'ai fait pour toi tout ce que j'ai pu ; et que si tu manques à être sauvé, il n'en faut accuser que le peu d'amitié d'un père.

GÉRONTE : Attends, Scapin, je m'en vais te signer cet acte.

SCAPIN : Dépêchez donc vite, Monsieur, je tremble que l'heure ne sonne.

GÉRONTE : N'est-ce pas une délégation que tu dis?

SCAPIN : Non : une procuration pour l’abandon conjoint de vos convictions écologiques communes.

GÉRONTE : Tu n’avais pas été aussi précis !

SCAPIN : Oui, c’est un fait ; mais l’émotion aurait pu vous tuer...

GÉRONTE : Que diable allait-il faire à cette galère ?

SCAPIN : Vous avez raison, mais hâtez-vous.

GÉRONTE : N'y avait-il point d'autre promenade que les Champs Elysées ?

SCAPIN : Cela est vrai. Nous n’aurions pas dû entrer au Palais. Mais l’illusion du pouvoir, une certaine naïveté...

GÉRONTE: Il est vrai que ce fut toujours un brave garçon... Ah ! maudite galère !

SCAPIN, à part : Cette galère lui tient au cœur.

 

 



29/08/2018
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