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Intervention de la France au Mali

Intervention française au Mali

 

 

S'il est difficile actuellement de peser le pour et le contre de l'intervention de la France au Mali, intervention tardive il est vrai, mais rendue nécessaire, en raison des traités signés, par la demande, tardive, du gouvernement du pays, il m'a semblé que donner mon avis d'ancien coopérant en Côte d'Ivoire - où j'ai toujours des contacts d'amitié profonde et durable, qui ont traversé le temps malgré les événements politiques – pouvait éclairer avec mesure et je l'espère raison, à la fois le choix de François Hollande – que certains ont accusé de renouer avec la Françafrique, terme dont le pêché est d'avoir couvert malversations et arrangements – et la position souvent très enthousiaste des Maliens dans leur grande majorité.

 

Une remarque pour commencer.

Je ne vois pas pourquoi un état allié à un autre état pas un traité d'intervention militaire en cas d'intrusion dans ses frontières, n'aurait pas le droit d'intervenir sous les prétextes suivants :

  • l'un est un état européen « blanc » ; l'autre un état africain « noir ». J'utilise ces deux termes pour simplifier afin d'éviter d'entrer dans des circonvolutions langagières qui nécessiteraient tout un paragraphe de définitions.

  • L'un est un ex-état colonisateur, l'autre une de ses anciennes colonies. Si on prête à l'état malien un statut « normal » d'état souverain, avec ce qu'il faut de constitution, de responsables démocratiquement élus, et d'administration, alors il faut être clair : le chef de gouvernement, en dehors de considérations de couleur de peau et de colonisation ancienne, a le droit et le devoir de demander l'aide de ses alliés si la population dont il est le responsable est mise en danger. Mettre en doute cette capacité d'exercer une telle responsabilité – faire appel à des troupes étrangères sur le sol national même d'un allié pose toujours problème de souveraineté - , c'est être raciste !

Quand on sait que ces réserves – ces critiques – viennent de personnages de gauche défenseurs du Tiers-Monde, c'est un peu fort, non ?

 

Voilà pour l'introduction.

Je définirai ensuite la guerre de conquête que mènent les groupes qu'on appelle « terroristes » et qui, pour l'essentiel des troupes, sont des personnes étrangères au Mali, bien qu'on puisse encore discuter du cas (par cas) et du statut des populations touaregs et assimilées.

 

Il s'agit d'une guerre coloniale, qui s'habille des défroques de la foi islamique, guerrehéritée de la conquête des 7 ème et 8 ème siècle menées par les « Arabes » (qui l'étaient peu) à l'assaut du bassin méditerranéen politiquement et militairement affaibli.

Armés d'engins modernes par l'imprudence coupable et criminelle des responsables politiques qui sont intervenus dans le conflit lybien (je rappelle qu'il s'agissait d'une guerre civile et non d'une ingérence extérieure) sans prendre les précautions élémentaires de neutraliser l'armement pléthorique et récent du dictateur Kadhafi, des groupes armés tentent de déstabiliser la zone sahélienne, dont les richesses du sous-sol attirent les ambitions d'états lointains et de groupes internationaux (méthode utilisée au Congo-Zaïre avec succès) souvent liés, afin de s'y tailler des zones « islamistes » et économiquement profitables, avant de s'attaquer aux riches régions du golfe de Guinée, déjà fragiles.

 

Cette guerre de conquête se heurte à l'intérêt des populations : intérêts économiques et sociaux – santé, éducation,, mais aussi sécurité des personnes, intérêts et statut de populations mis en péril à la fois dans leurs traditions et dans leur récente accession à la démocratie.

 

Ces populations sont liées à la France– par les liens nés de la colonisation certes mais qui sont enfouis profondément aujourd'hui dans les mentalités, qu'on le veuille ou non (nous sommes tributaires des colonisation romaines, germaniques etc, souvent violentes et personne ne les dénonce, ce me semble, peut-être parce qu'ils étaient blancs ?), souvent avec sympathie – malgré les excès, les peuples pardonnent plus facilement que les individus – d'autant plus que de fortes minorités sont implantées en métropole, y vivent, payent leurs impôts et charges (comme certains français, pas tous), y installent durablement leurs familles hexagonales et continuent à soutenir leur famille d'Afrique.

 

Liens pérennes, complexes dont – la vie est très dure en Afrique, même pour les Africains, surtout pour les Africains – ils s'arrangent avec fatalisme parfois « Dieu le veut ! »

Qui n'est pas toujours soumission : on peut le voir aux soubresauts d'une vaste région qui n'a pas encore trouvé ses équilibres politiques internes - rôles des ethnies et des communautés- ni externes – tracé des frontières des états.

 

Mais est-ce une raison pour proclamer :

« Laissons les Africains se débrouiller, il est normal qu'une armée de « noirs » vienne au secours d'un pays de « noirs » mais surtout pas des « blancs », ils ont déjà fait assez de mal. »


Je n'ai aucune propension à me charger de l'héritage des Français des siècles précédents quand mes arrières- grands parent ignoraient la traite des esclaves d'Afrique, et qu'ils s'inquiétaient plutôt de leurs petits-enfants travaillant dans les mines du Nord aux conditions inhumaines décrites par Zola dans Germinal.

Il y a autant de différences entre un Ivoirien et un Africain du Sud qu'entre moi et un baoulé du centre de la Côte d'ivoire*. Je ne vois pas quels liens uniraient des populations si éloignées par l'histoire, la langue, la culture – fut-elle « africaine » - le mode de vie, les projets et même le modèle politique (celui visible d'une démocratie à la française, celui plus discret des anciennes royautés régionales)...sauf la couleur de peau, ce qui est un comble !Ou alors, c'est qu'il y aurait une sorte de « profil » africain, un comportement et une mentalité particulière attachés à la couleur de la peau ? Je n'y crois pas.

L'expérience des organisations trans-gouvernementale est là : même s'il est souhaitable qu'à terme le continent africain se donne les moyens, région par région (il ne faut pas rêver, l'OUA(1) est là, pérenne et solide, mais les intérêts sont trop éloignés en cas de conflit de ce genre où les décisions doivent être prises et les moyens mis en place rapidement), de mettre en place des organismes de réflexion, de décision et d'intervention communs. On le voit avec l'Europe : plus le « machin » est grand, plus il est lent et malaisé.

Clovis a mené ses conquêtes avec 800 « paras » !

 

Il est juste que des populations amies soient secourues dans ce genre de situation. Les associations humanitaires, aussi efficaces soient-elles, ne pourront organiser les secours qu'après le retour de la stabilité régionale. Il est heureux – et les Maliens l'ont bien perçu – que l'armé française soit intervenue si vite et si efficacement (encore une intervention payée par la Dette, messieurs les bons apôtres de la rigueur!, tout comme les actions humanitaires !).

 

Rétrospectivement, on aurait aimé que l'armée anglaise soit intervenue aussi vite et efficacement en 1914 (l'Allemagne envahit la Belgique, état neutre protégée par les traités) et en 1940 (rebelote, les Allemands passent par la Belgique, toujours état neutre !)

Chamberlain a mis moins de temps pour signer les accords de Munich que pour mobiliser.

Les capitaux des industries de l'armement étaient déjà internationaux, Wall Street et la City avaient des actions chez Krupp, Messerschmitt et IG Farben.

L'Europe, à l'ère de la mondialisation, est aussi longue à se mobiliser que le Royaune-Uni d'alors, déjà champion du tapis rouge.

On ne se refait pas.

 

(1)l'OUA est l'Organisation de l'Unité Africaine

Je rappelle que la reconquête militaire de la France après la défaite de 1940 a commencé en Afrique de l'Ouest, grâce à des troupes levées dans nos colonies d'alors. Nous leur devons bien notre aide actuelle.

 

*Je suis très fier de pouvoir expliquer à mes amis africains que ma grand-mère, toute petite paysanne lorraine, était"baoulée", en ce sens qu'elle vivait - et j'ai vécu mes vacances pendant 9 ans avec elle - comme une paysanne du centre de la Côte d'Ivoire. c'est elle sans le savoir qui m'a appris à mieux comprendre cette Afrique rurale quand je débarquai, à 20 ans, sur le quai de la gare de Bouaké.



16/01/2013
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