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ENA et Sciences Po : la remise en question

ENA et Sciences Po : la remise en question

 

L’importance du double coup de tonnerre qui frappe la formation de nos élites a, semble-t-il, échappé à la presse et à nos meilleurs chroniqueurs.

Ces deux décisions presque concomitantes - Le Président Macron adorerait- sont plus qu’un symbole, mais une prise de conscience : nos élites, formées pour l’essentiel dans ces deux Grandes Ecole se sont aperçues que leur formation ne correspondait plus à notre époque. En fait, pour faire court, qu’ils étaient NULS !!

Les deux grands navires se sabordent à quai et ce sont leurs capitaines qui mettent le feu à bord !

On leur saura gré plus tard de tant de clairvoyance.

 

Voyez plutôt :

- d’abord, la disparition de l’ENA, organisme vétuste créé après la seconde guerre mondiale pour former une élite républicaine capable de remplacer rapidement tant le personnels administratif des plus hautes catégories, mouillées plus ou moins au mieux dans la politique pétainiste ; au pire dans l’allégeance à l’Allemagne.

Cet organisme aurait dû être depuis longtemps effacé du paysage éducatif, tant la formation et l’organisation en réseaux a de plus en plus phagocyté le monde interlope de l’administration centrale – faisant de Berçy une sorte de gouvernement parallèle, voire à certaines périodes, un État dans l’Etat -, de l’économie- avec ces allers-retours douteux de l’administration à la banque, du public au privé, avec ce que l’on imagine de prébendes, d’avantages, d’alliances contre-nature et de renvois d’ascenseurs...pour plus tard.

 

Administration centrale certes, mais aussi le monde politique, si proche, celui de l’entreprise, entreprenant, et jusqu’aux médias, tant les personnels et les décideurs, souvent issus des mêmes bancs d’école ou des mêmes familles, s’épaulent, se co-optents, se soutiennent, se couvrent. Etc.

 

Ainsi la Vème République, énorme monument qui ne tient debout que par la force de l’élan depuis 1945 et antérieurement, par la force d’inertie des républiques précédentes, n’est-elle plus qu’un vaisseau de haut-bord vermoulu qui tient à quai par l’amoncellement de contreforts, d’arc-boutants, de câbles et de filins qui entremêlés par la force de l’habitude, les alliances nouvelles et les compromissions anciennes, renouvelées à chaque promotion de la grande école d’administration.

 

Exit donc l’E.N.A.

 

La seconde décision a été prise par le conseil d’administration de Sciences PO et relayée par la voix de son directeur. Il ne s’agit pas d’une dissolution de cette Grande Ecole classée au 3 ème rang des Universités mondiales (politique et études), mais d’une modification dans les modalités d’entrée.

Fini le concours, place à une sélection par la qualité semblerait-t-il.

Pour avoir jeté un coup d’oeil sur les nouvelles conditions, il s’agit, des propos mêmes du Directeur, d’une discrimination positive. Elle apparaît dans l’énoncé des modalités avec deux cursus d’entrée, l’un sur dossier et échanges oraux, l’autre à la suite d’épreuves écrites, la décision étant prise sur dossier.

Dossier complexe qui introduit une forte dose d’objectivité relative– on verra fleurir bientôt des centres de formation à l’entrée des Grandes Ecoles comme il y en eut pour les tests socio-éducatifs -, une incertitude quant au niveau de fiabilités des dossiers des établissements d’origine - qui conduiront le jury d’admission à noter les années suivantes les établissements d’origine en fonction des résultats postérieurs de leurs candidats- et une inévitable confusion entre les qualités de présentation d’un candidat lors d’un oral – enseignant, j’ai sous-noté, c’est sûr, des candidats antipathiques, voire teigneux ou tout simplement gênés par la rencontre, ou l’affrontement.

Il en est de même lors d’un contrôle de police, d’un passage au tribunal et dans la vie courante, comme lorsqu’on rencontre ses futurs-beaux-parents.

Je me souviens d’un collégien très policé, joli garçon, serviable et bien mis, sans problèmes scolaires – mais déjà dissimulé et pervers- plusieurs fois rencontré depuis à la première page de l’actualité, côté prison.

Modifier le concours d’entrée soit. Mais n’aurait-il pas mieux valu en modifier les critères ?

 

Modifier le mode de sélection qui fera apparaître, au bout de quelques années, les défauts qu’on imagine – préparation intensive dans les établissement publics et privés, voire dans des officines spécialisée, à la consolidation des dossiers de candidature sur les critères qui apparaîtront très rapidement comme décisifs ; choix discutable de jeunes gens ambitieux ayant adopté le »profil » psycho-social souhaité standard favorisant la discrimination positive ; une continuité avec les monde des médias et de la politique, hantée déjà par tant de marchands de tapis ?

 

Avec le risque d’avoir, en fin de parcours, des hommes et des femmes aux dents plus longues que les précédents- un peu mous et déjà petits trop bien nourris – plus dynamiques, plus ambitieux, sans le complexe de l’origine sociale mais avec l’arrogance de ceux qui croient avoir réussi tout seuls, ce qui sera presque le cas.

 

N’aurait-il pas mieux valu modifier des critères d’entrée en réfléchissant à une ouverture, par exemple en demandant au candidat lors de l’oral de défendre quelques points de ses exposés écrits. Ou d’imaginer des épreuves écrites et orales qui mettent en œuvre savoirs, imagination, créativité et capacité de décision ?

 

Exit l’E.N.A, fin du Concours d’entrée à Sciences Po ;

La Vème République entre à l’Ehpad !

C’est épatant.

 

 

 



29/06/2019
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