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Les nouveaux esclavagistes

 

Les nouveaux esclavagistes



Def "esclavage" : Par extension, le terme esclavage désigne un système socio-économique qui est fondé sur le maintien et l'exploitation de personnes



 

L'esclavage n'a pas disparu : il s'est simplement affublé de défroques démocratiques, dépouilles usées par les années et les guerres, sorties à chaque élection d'une boutique de chiffonniers, parfois d'Emmaüs (on a même vu le fripier devenir ministre!

L'esclavage est toujours là : l'orchestre seul a changé, violon pour le violon et la garde à vue, contrebasse pour les contredanses, grosse caisse pour les banquiers ; les chanteuses ne sont plus des putains : elles sont députés ; les barytons ne sont plus légers : les indemnités qu'ils se votent pèsent lourdement sur le budget. Le chef d'orchestre, gesticulateur précoce -et cossard -, bat des ailes dans le vide : le Carnaval est quotidien, qui amuse les esclaves.

L'esclavage est omniprésent : il est dans les hypermarchés où travaillent à mi-temps des employés pour des salaires de misère qui ne suffisent plus à se loger. Il est dans les services, où les heures de nuit ne peuvent faire vivre durant le jour. Il est dans ces métros où l'on dort, sur ces trottoirs où on gèle, dans ces restaurants de la pauvreté qui se multiplient au coin des rues plus vite que les coins des rues ne peuvent se multiplier. Ainsi la ville s'étend, et son réseau de misère.

L'esclavage use, rabotte, rattatine, détruit : il détruit les gens qu'il assassine par la faim, l'errance, la promiscuité, l'indignité. Il détruit les maisons où la misère s'entasse, les espaces où la misère se réfugie. Il détruit.

Autrefois, les esclavagistes et leurs valets étaient armateurs, capitaines de bateaux de commerce, prêteurs sur gages, officiers de police et de justice, propriétaires fonciers, fermiers généraux, militaires.


Aujourd'hui, ils sont toujours là : ils ont fonction de banquiers, hommes politiques, avocats, juges, entrepreneurs, gérants, propriétaires immobiliers. Ils ne le sont pas tous, tous ensemble, mais parfois tour à tour, ou comme par inadvertance, par naïveté, sans le savoir. Certains le savent, et en sont fiers : ce sont souvent d'honorables hommes d'affaires, sortis pour la plupart de grandes écoles en passant par des écoles privées – de tout , surtout de morale : sauf d'argent .


Les Maîtres sont des financiers internationaux – barons de pacotille ; frères de sang, de lait, de nom ;  propriétaires de banques -, des marchands d'armes et de béton ou de biens de consommation courants. La plupart n'ont eu d'autre mérite que de naître et de parfois se bien entourer (je veux dire efficacement). Ils ne connaissent rien du monde où ils vivent : leur monde tient du château par l' altitude, du palais par le luxe, du blockhaus par la  sécurité, de la tombe par l' ignorance.


Ils ont de hauts-valets, qui auraient pris autrefois le nom d'intendants, de fermiers généraux, de ministres, d'officiers supérieurs dans l'armée. Certains titres et fonctions ont été conservés. D'autres ont pris le nom de PDG, de courtiers, de hauts fonctionnaires : on les paie grassement pour qu'ils se voilent la face, pour qu'ils se taisent, pour qu'ils mentent (mais c'est déjà se taire). Car eux connaissent mieux la détresse, les fins de mois difficiles, l'indignité, les petites diffficultés du quotidien qui, s'accumulant, font les grandes misères. Certains les connaissent parce qu'ils les ont rencontrées. Issus parfois de milieux modestes, ils se sont arrachés à coups d'études, d'ambition, parfois de compromissions. Leur salaire est à la hauteur de leurs oeillères : larges et épaisses.

Ce sont les bras armés des esclavagistes, leurs premiers mercenaires : ils réfléchissent, ils décident, ils agissent. Parfois seuls ; d'autres fois en bandes organisées, en Conseils d'Administations. Dont ils touchent les prébendes, souvent sans s'y rendre. Ils volent, mais on les laisse faire : ils sont serviles.

Au-dessous viennent les bas-valets, les seconds couteaux. On est obligé d'utiliser le vocabulaire des bas-offices, des coupes jarrets : il n'y en a pas d'autres. Ils sont liés aux précédents par l'intérêt et par l'ambition. Leur sens moral, s'il a existé, s'est perdu dans les sables mouvants des emplois subalternes – qu'ils ne méritaient pas- des besognes peu glorieuses -dont ils répugnent à parler -, des « coups » qu'ils ont faits, de ceux qu'ils ont donnés et reçus. Employés, ils revendiquent un statut de cadres, avec la suffisance de l'encadrement d'un tableau de maître dont il faudrait admirer les dorures en ignorant l'oeuvre picturale.

Ils ont nom conseiller, journaliste, secrétaire, expert (en économie, en finances, en un peu n'importe quoi) portent parfois des initiales – DRH, CSP- . Ils sont porte-parole, attachés de , avocats, parfois juges. Elus, ils portent plusieurs casquettes, comme on portait autrefois une épée à gauche et une dague à droite : les armes de poing restaient dans les fontes du cheval. Certains sont armés, qui n'hésitent pas à porter un uniforme, au nom d'une loi qui dessert l'intérêt des leurs.

La Fontaine regarde d'un oeil amusé : le Grand Siècle n'est pas si loin.

Les esclavagistes et leurs affidés ont des intérêts communs : l'argent et le pouvoir.

Il leur faut conjuguer absence de morale, ignorance du monde, et rapacité financière (qui à elle seule explique cette sorte d'aveuglement qui leur fait croire – pour les plus sincères et les plus ignorants – qu'ils sont nécessaires à la marche du monde, alors qu'ils ne sont au mieux que la mouche du coche de la fable, au pire de vecteur de la malaria) pour organiser un monde où le sur-travail des uns profite à un tout petit nombre. Il leur faut de la duplicité et des complicités nombreuses parmi ceux qui sont exploités pour entretenir le message d'une économie qui ne fonctionne que grâce à leurs mérites (qui sont grands) et à ceux des gens qu'ils contrôlent. Ils s'appuient sur les médias, qu'ils contrôlent, les gouvernements, qu'ils assujettissent, les journalistes qu'ils paient, les élus dont ils soutiennent les campagnes, et sur certains fonctionnaires qu'ils achètent.


Les esclavagistes ont des esclaves : ce sont tous ceux qui travaillent pour obtenir, à la fin du mois, juste ce qu'il leur faut pour survivre. On emploie pour les maintenir dans cet état de précarité des mesures légales : le SMIC, le RSA qui encadrent les salaires les plus bas, les allocations-logements qui disparaissent ou s'amenuisent à la moindre hausse des revenus ; des loyers élevés et, concomitemment, une insuffisance du parc locatif ; des horaires partiels qui se couplent avec des mesures de chômage technique.... Le surt-ravail - heures supplémentaires non payées dans l'intérêt de l'entreprise, cadences infernales, maltraitance psychologique – comme son sous-paiement génére des coûts sociaux – désordres familiaux, grèves, accidents, maladies – payés par la collectivité, et l'endettement, voire le surendettement qui profite à nouveau à la chaîne esclavagiste. Un volant de chômage est organisé parallèlement – j'ai écrit « organisé », je n'ai pas écrit qu'il était volontairement mis en place, je m'interroge, seraient-ils aussi malins?- qui maintient des salaires bas pendant que la propagande propage ses propositions de consommation en répétant par exemple que la surconsommation est nécessaire pour maintenir l'emploi.

Un volant important de SDF, dont certains ont un emploi régulier, et de Sans-Papiers, transportés par des esclavagistes et employés par d'autres, entretient un climat préjudiciable à la cohésion sociale qui pourrait garantir une riposte aux excès esclavagistes.

 On en est loin : les Partis politiques dits de gauche , organisés en entités pour leur survie et leur expansion, réagissent comme des blocs autonomes menacés par les enjeux. Leur intérêt, leur semble-t-il, est d'ignorer le contexte pour se renforcer avant d'entreprendre une politique globale de lutte contre l'esclavagisme. Ils ignorent que les esclavagistes se sont toujours organisés avant de perdre le pouvoir politique de façade, afin d'en conserver les rênes en coulisse. On ne peut expliquer que de cette façon l'abolition(dans le discours) de l'esclavage le 4 août 1789 alors qu'il ne sera aboli de fait qu'en 1848 (et maintenu, en réalité, dans les colonies). Pour ce qui est de la France.


Il a bien fallu trouver alors d'autres solutions.

Nous y sommes.



13/02/2010
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